Du
logement social aux sociétés de logement de service public (SLSP)
texte tiré de :
Mouvement Luttes Solidarités Travail
http://www.mouvement-lst.org/theme_logement.html?gclid=CJn09uaEqq8CFcYOfAodIECOYQ
Les modifications récentes apportées
au Code wallon du logement font apparaître une scission nette entre
deux fonctions traditionnellement assumées par le « logement social
».
D’une part, se profile une politique
du logement « public » au travers de sociétés de logements de
service public qui s’adresseront davantage à des usagers plus
aisés. Le caractère social du logement public était jusqu’à
présent d’abord défini en fonction des revenus des locataires et
d’une contribution maximale de 20 % de ces revenus au coût du
logement. L’accès au logement public semble vouloir être étendu
à de nouvelles catégories de revenus.
D’autre part, la prise en charge des
locataires aux statuts et revenus plus précaires se fera
par des structures particulières qui
insisteront sur l’accompagnement social des occupants.
On songe notamment aux institutions et
pratiques « expérimentales » rassemblées sous
l’appellation « APL » (association
pour la promotion du logement), aux AIS, au Service d’aide
locative du Fonds du Logement des
familles nombreuses.
Cette double évolution du secteur du «
logement public » répond à différents objectifs.
D’une part, l’ouverture accrue du
logement public aux ménages à revenus moyens s’inscrit
dans des logiques d’accroissement de
la mobilité et de la flexibilité rencontrées dans monde
du travail.
D’autre part, le logement des plus
pauvres au travers d’outils institutionnels particuliers
traduit la volonté politique de mieux
contrôler les diverses formes d’habitats de survie dans
lesquels ces familles trouvent
habituellement à se loger (réglementations en matière de
salubrité, permis de location, plan «
habitat permanent » des campings etc.).
- Une brève histoire du logement social
Cette double évolution s’inscrit en
réalité dans un long processus évolutif. Une brève histoire du
logement social permet de mieux comprendre les changements à
l’oeuvre actuellement ainsi que leur incidence dans la vie des plus
pauvres.
Elle met d’abord en lumière
l’orientation de ces logements vers les populations en situation
de difficulté par rapport à
l’habitat. Les cités dortoir constituées de tours qui se gavent
de
logeurs ont succédé aux cités
ouvrières attachées à l’usine.
Le lien évident entre la naissance du
logement social et la nécessaire stabilisation de la
main-d’oeuvre pour l’attacher à
l’usine ne doit plus être démontré. Cela a donné naissance
aux « corons » et aux formes
d’habitat ouvrier à l’initiative de certains patrons
« sensibilisés », au travers
d’habitats gérés collectivement, de coopératives en réponse aux
démarches « paternalistes » des
patrons et autres comités de patronage.
L’histoire du logement social
illustre ensuite combien les conditions d’habitat misérables ont
entraîné des réactions de la part
des pouvoir, public, au travers de politiques de soutien à la
création de logements et de lutte
contre les taudis.
a) Trois fonctions essentielles
du logement social
Au-delà de l’évidente mission de
création d’habitations, les politiques publiques ont poursuivi
trois fonctions essentielles que nous
retrouverons encore dans le logement social actuel.
1. Une dimension économique
Outre les aspects économiques liés à
l’activité de construction et de gestion de ce patrimoine
immobilier, ainsi qu’aux possibilités
de réguler un marché immobilier sujet à des spéculations
parfois extrêmes, on peut identifier
des mécanismes qui traduisent une fonction régulatrice
dans les déplacements (ou de fixation)
de la main-d’oeuvre. A certaines époques, la volonté
de stabiliser la main-d’oeuvre, en
fonction des exigences des industries et des patrons, est
dominante. A d’autres périodes comme
aujourd’hui, on tend à favoriser la mobilité de la
main-d’oeuvre
2. Un « hygiénisme social »
La naissance du logement social
favorise le développement d’une urbanisation qui contribue
à mettre de « l’ordre » dans
l’espace habité. Au travers de mécanismes de surveillance et de
contrôle sur les populations, cette
volonté d’ordre participe à la fonction de « normalisation »
de l’habitat. Des « standards » de
logement sont progressivement définis, qui produisent des
effets spéculatifs et des effets
sociaux non recherchés, comme le déclassement de
logements pour inadaptation,
insalubrité ou inhabitabilité.
On peut souligner par exemple l’effet
pénalisant de l’exigence d’un permis de location sur le
nombre de logements accessibles aux
plus pauvres (notamment dans le secteur des
chambres meublées et petits logements
individuels).
3. La différenciation sociale
La mixité des populations se réalise
autant par les fonctions de l’habitat que par la position
occupée dans le monde du travail. Il
est clair que la création de grands ensembles
d’habitations sociales contribuait à
concentrer des populations de catégories socioprofessionnelles
similaires, que manifestait le
phénomène des ghettos sociaux. On peut
s’interroger sur l’effet réel de
la volonté actuelle des politiques de logement de favoriser les
mélanges de populations.
On constate que les opérateurs du
logement de service public se partagent en quelque sorte
la population « cliente » en fonction
de deux critères :
le niveau de précarité des
locataires,
la situation du bien en location dans
le patrimoine public ou dans le patrimoine privé.
Nous reviendrons sur cette question
dans la suite de notre réflexion.
On est tenté de rappeler ici
l’exigence en Flandre de l’apprentissage du néerlandais pour
accéder à un logement social.
b) Le soutien à la brique et
l’accès à la location
La Belgique soutient traditionnellement
l’accès à la propriété. Ce choix politique fait de la
Belgique l’un des pays occidentaux
comptant le plus d’habitants propriétaires.
L’Etat aide les ménages (à plus
faibles revenus) dans l’accès à l’emprunt hypothécaire. Mais
l’incitant fiscal profite surtout aux
ménages qui payent un impôt. Ceci ne concerne pas,
évidemment, les personnes ou familles
qui ne payent pas d’impôt parce que leurs revenus
sont trop faibles, et tous ceux et
celles qui ne contractent pas d’emprunt hypothécaire. On
pourrait peut-être imaginer un impôt
négatif pour le remboursement de l’emprunt hypothécaire pour ceux
dont les revenus sont tellement faibles qu’ils ne payent pas
d’impôt.
La précarisation croissante de
l’emploi a conduit la Région wallonne à mettre en place un
système d’assurance contre la perte
de revenu. Cette garantie, fort importante, est à durée
limitée et laisse l’emprunteur seul
devant la charge d’emprunt une fois la période de
couverture d’assurance expirée.
Les aides à la rénovation, à la
restructuration, à l’embellissement ou à l’isolation sont
difficilement accessibles aux
populations qui se débrouillent sur leurs propres forces avec
des matériaux souvent récupérés.
Nous constatons que les plus pauvres ont difficilement
accès à ces formules.
Pour ceux qui n’accèdent pas à
la propriété, il reste un marché locatif privé, abandonné aux
lois du marché et sur lequel les
pouvoirs publics agissent peu (quelques incitants fiscaux
comme la réduction du revenu cadastral
pour les familles nombreuses ou en fonction de
handicaps). Il n’existe aucune
volonté politique de s’attaquer aux aspects spéculatifs du
marché immobilier. L’inaccessibilité
financière des logements est criante et les discriminations à
l’entrée également (refus des chômeurs et des personnes
dépendant du CPAS, etc.). Des réglementations visent certes à
promouvoir la qualité de l’habitat (permis de location, critères
d’insalubrité), mais provoquent des effets pervers immédiats sur
les locataires contraints de vider les lieux.
Il reste également aux locataires
l’accès au logement social (logements de service public,
AIS, FLW, etc.). Le déficit du nombre
de logements sociaux accessibles aux familles pauvres
est connu.
Une troisième voie est recherchée
depuis plusieurs années, particulièrement sous la forme
des agences immobilières sociales. Ces
initiatives facilitent certes l’accès locatif pour des
personnes ou familles en situation de
grande pauvreté, mais la charge reste souvent élevée
par rapport aux revenus, et dépasse
allègrement le seuil des 20% défini pour l’accès au
logement social classique
17 octobre 2006 - Journée mondiale du
refus de la misère - Mouvement Luttes Solidarités Travail
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